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2019

Katja Avdeeva et Tamara Kordzadze (redoutable musicienne !) vont faire rutiler les deux pianos mis dos à dos en quinconce (un Bösendorfer pour Katja, un Steinway pour Tamara, avec leur différences de timbres qui vont rendre très lisibles le partage des voix). Une Rhapsody in blue impeccable, puis les deux Sonates de Gerber que je suis avec une extrême attention en mémoire de mon vieil ami René, qui jamais n’aura été si bien servi (Charles me dit avoir écouté le vieil enregistrement mal fait et mou qu’il en possède !). Si la première est sans surprise, avec ses thèmes très « français populaires » qui me sont coutumiers, la deuxième plus tardive est d’un tout autre bois, avec ses rythmes obstinés et son énergie : je suis stupéfait de voir ces artistes qui ne l’ont pas connu si bien pénétrer et interpréter ses œuvres, si seulement il avait pu entendre cela…

Mais le plus pur émerveillement m’est fourni par la Sacre du Printemps : sous leurs doigts cela prend des couleurs, un relief, une souplesse, absolument magnifiques, je me remplis des sonorités si riches des deux pianos, très nettes et claires, lisibles, que je préfère à la version orchestrale.

Aussi bien au niveau de la résistance physique, de la concentration sans faille, et de l’intelligence de la lecture, cette œuvre me plonge dans une grande admiration et un plaisir tout neuf. 

Après la pause ce seront, avec Katja et Marc Pantillon, les si rares, consistantes et difficiles Visions de l’Amen de Messiaen.

Cette musique hypnotique, ne ressemblant à aucune autre (ce langage de Messiaen : personne n’a écrit comme lui avant, ni après d’ailleurs, il se reconnaît en deux mesures) aux rythmes subtils obsédant invitant à lâcher totalement prise et à accéder à un monde de spiritualité, est un véritable tour de force pour les pianistes, au niveau des doigts, des rythmes, des couleurs, de l’ensemble, et réclame une énergie peu commune des exécutants.

On n’est pas près d’avoir l’occasion de réentendre en concert ces Visions, et surtout pas dans une version aussi inspirée, honnête et authentique.

Au-delà du plaisir très profond que cela m’apporte, je suis sidéré de la résistance sans faille de Katja, qui avec une simplicité déroutante assume la tenue de ce festival, a déjà tant donné dans le Sacre, et maîtrise avec une attention incroyable cette terrible partition.

Cette artiste « est » la musique et m’inspire une absolue confiance dans ses interprétations, aussi bien au niveau de ses moyens que dans ses capacités de compréhension d’interprète.

Texte Pierre-E. Macchi

Dimanche 10 février 2019
Temple du Bas
Tamara Kordzadze et Katja Avdeeva
Igor Stravinsky   Sacre du Printemps (les extraits)



Marc Pantillon et Katja Avdeeva
Olivier Messiaen Visions de l'Amen



26 janvier 2019
Temple du Bas
Alexander Sahatci
Mozart Concerto en la majeur KV 448 (1 mouvement)



3 février 2019
Temple du Bas
Simon Bürki (rappel)